Fioretti de Saint François d’Assise..(3 premiers chapitres)
UNE MERVEILLE !! , Myriamir à La Source, le 18 juin 2016-06-20
Ce livre contient quelques-unes des petites
fleurs, miracles et exemples de dévotion du glorieux petit pauvre messire saint
François et de quelques-uns de ses frères et compagnons très dévots.
A la louange de Jésus-Christ. Amen.
CHAPITRE 1
Des douze
premiers compagnons de saint François
En premier, il est à considérer que le glorieux messire
saint François, en tous les actes de sa vie fut conforme au Christ: car, comme le Christ au début de sa
prédication appela douze disciples à mépriser toute chose mondaine et à le
suivre en pauvreté et dans les autres vertus; ainsi saint François choisit au
début de la fondation de l’Ordre ses douze compagnons qui firent profession de
la très haute pauvreté. Et comme un des douze apôtres du Christ, réprouvé de
Dieu, finalement se pendit par la gorge; ainsi un des douze compagnons de saint
François qui eut nom frère Jean de la Chapelle, apostasiant, finalement se
pendit de même par la gorge. Et ceci est pour les élus grand exemple et motif
d’humilité et de crainte, considérant que nul n’est certain de persévérer
jusqu’à la fin dans la grâce de Dieu.
Et comme ces saints apôtres furent pour tout le monde,
merveilleux de sainteté et pleins de l’Esprit-Saint, ainsi ces très saints
compagnons de saint François furent des hommes de si grande sainteté, que depuis le temps des apôtres, le monde
n’eut pas d’hommes aussi admirables et aussi saints: car l’un d’eux fut ravi
jusqu’au troisième ciel, comme saint Paul, et celui-ci fut frère Gilles; un,
autre des leurs, à savoir frère Philippe le Long, fut touché aux lèvres par
l’ange avec un charbon ardent, comme le fut Isaïe le prophète; un autre des
leurs, à savoir frère Sylvestre, parlait avec Dieu comme le fait un ami avec
son ami, à la manière de Moïse; un autre volait, par la subtilité de son
intelligence, jusqu’à la lumière de la divine Sagesse, comme l’aigle,
l’évangéliste Jean, et celui-ci fut le très humble frère Bernard, qui
expliquait avec une très grande profondeur la Sainte Écriture; un autre des
leurs fut sanctifié par Dieu et canonisé dans le ciel, alors qu’il vivait
encore sur la terre, et celui-ci fut frère Rufin, gentilhomme d’Assise. Et
ainsi tous furent privilégiés de signes particuliers de sainteté, comme il se
verra par la suite.
CHAPITRE 2
Comment frère Bernard abandonna le monde pour servir Dieu
Le premier compagnon de saint François fut frère Bernard
d’Assise, qui se convertit de cette façon. Saint
François étant encore en habit séculier, bien qu’il eut déjà dédaigné le monde,
allant tout méprisable et mortifié par la pénitence, de sorte que, beaucoup le
tenaient pour un insensé; comme un fou, il était bafoué et chassé avec des
pierres et de la boue par ses parents et les étrangers, mais en chaque injure
et moquerie, lui, s’en allait avec patience comme un sourd et muet: messire
Bernard d’Assise, qui était l’un des plus nobles, riches et sages de la ville,
commença à considérer avec sagesse en saint François le mépris si excessif du
monde, la grande patience dans les injures, et que depuis deux ans, ainsi
abominé et méprisé de tous, il paraissait toujours plus constant et patient; il
commença à penser et à se dire en lui-même: « En aucune façon il ne se
peut que ce François n’ait une grande grâce de Dieu ». Et il l’invita le
soir à souper et à dormir et saint François accepta et soupa le soir et logea
chez lui.
Alors messire Bernard se proposa de considérer
attentivement sa sainteté. Aussi il lui fit préparer un lit dans sa
propre chambre, dans laquelle une lampe brûlait toujours durant la nuit. Et
saint François, pour cacher sa sainteté, aussitôt qu’il fut entré dans la
chambre, se jeta sur le lit et fit semblant de dormir. Et messire Bernard, de
même, après quelque temps, se coucha et commença à ronfler avec force comme
s’il dormait très profondément.
Alors saint François, croyant vraiment que messire
Bernard dormait, se leva du lit sur le premier sommeil et se
mit en oraison, levant les yeux et les mains au ciel; et avec une très grande
dévotion et ferveur, il disait: « Mon
Dieu! Mon Dieu! » Et
ainsi parlant et pleurant abondamment, il demeura jusqu’à Matines, répétant
toujours: « Mon Dieu!
Mon Dieu! », et rien
d’autre.
Et cela, saint François le disait, contemplant et
admirant l’excellence de la divine Majesté, qui daignait condescendre aux torts
du monde qui périssait et par son serviteur François le petit pauvre, se disposait à pourvoir au remède du salut de
son âme et de celle des autres. Et pour cela, illuminé de l’esprit de
prophétie, prévoyant les grandes choses que Dieu devait faire par lui et par
son Ordre, et considérant son insuffisance et son peu de vertu, il appelait et
priait Dieu i que, par sa pitié et sa Toute-Puissance, sans laquelle ne peut
rien l’humaine fragilité, il suppléât, aidât et accomplît ce qu’il ne pouvait
par lui-même. Messire Bernard, voyant à la lumière de la lampe, les actes très
pieux de saint François et considérant avec attention les paroles qu’il disait,
fut touché dans son coeur par l’Esprit-Saint et inspiré à changer sa vie.
C’est pourquoi, dès le matin, il appela saint François et
lui parla ainsi: « Frère François, j’ai bien décidé dans
mon coeur d’abandonner le monde et de te suivre en ce que tu me
commanderas ». Entendant
cela, saint François se réjouit en esprit et parla ainsi: « Messire
Bernard, ce que vous dites est une oeuvre si grande et difficile, qu’il nous
faut demander conseil à notre Seigneur Jésus-Christ et le prier qu’il lui
plaise de nous montrer sur cela sa volonté et de nous enseigner comment nous
pouvons la mettre à exécution.
Pour cela,
allons ensemble à l’évêché, où il y a un bon prêtre, et nous ferons dire la
messe; puis nous resterons en oraison jusqu’à Tierce, priant Dieu qu’au moyen
de trois ouvertures du missel, il nous montre la voie qu’il lui plaît que nous
choisissions ». Messire Bernard répondit que cela lui plaisait beaucoup.
Ils se mirent alors en route et allèrent à l’évêché; après qu’ils eurent
entendu la messe et qu’ils furent restés en oraison jusqu’à Tierce, le prêtre,
à la prière de saint François, prit le missel et, ayant fait le signe de la
croix, l’ouvrit trois fois au nom de notre Seigneur Jésus-Christ.
A la première ouverture ce fut cette parole que dit le Christ dans
l’Évangile au jeune homme qui l’interrogea sur la voie de la perfection: « Si tu veux être parfait, va
et vends ce que tu as et donne-le aux pauvres, et viens et suis-moi ».
A la seconde ouverture ce fut cette parole que le Christ dit aux
apôtres, quand il les envoya prêcher: « N’emportez
rien pour la route, ni bâton, ni sac, ni chaussures, ni argent »,
voulant leur enseigner par là, de mettre toute leur espérance en Dieu pour
avoir de quoi vivre et n’avoir d’autre volonté que de prêcher l’Évangile.
A la troisième ouverture du missel ce fut cette parole que le Christ dit: « Qui veut venir après
moi, qu’il renonce à soi-même et prenne sa croix et me suive ».
Alors
saint François dit à messire Bernard: « Voici
le conseil que le Christ nous donne. Va, donc, et fais complètement ce que tu
as entendu. Et que béni soit notre Seigneur Jésus-Christ qui a daigné nous
montrer sa voie évangélique ». A
ces mots, messire Bernard s’en alla, et vendit ce qu’il avait, car il était
très riche; et avec grande allégresse il distribua le tout aux pauvres, aux
veuves, aux orphelins, aux pèlerins, et aux monastères et aux hôpitaux; et
saint François l’aidait en tout cela fidèlement et avec sollicitude.
Or un homme qui avait nom messire Sylvestre, voyant que
saint François donnait et faisait donner tant d’argent aux pauvres, resserré
par l’avarice, dit à saint François:« Tu ne m’as pas entièrement payé de ces
pierres que tu m’as achetées pour réparer les églises; aussi, maintenant que tu
as de l’argent, paie-moi ». Alors saint François, s’étonnant de son avarice et ne
voulant point contester avec lui, en véritable observateur de l’Évangile, mit
les mains dans le giron de messire Bernard; et, pleines d’argent, les mit dans
le giron de messire Sylvestre, disant que s’il en voulait davantage, il en
donnerait davantage. Content de cela, messire Sylvestre les quitta et retourna
chez lui.
Et le soir, repensant à ce qu’il avait fait le jour, il
se reprocha son avarice, et considérant la ferveur de messire Bernard
et la sainteté de saint François, la nuit suivante et les deux autres, il eut
de Dieu une certaine vision: de la bouche de saint François sortait une croix
d’or dont le sommet touchait le ciel et dont les bras s’étendaient de l’orient
jusqu’à l’occident. A cette vision, il donna pour Dieu ce qu’il avait et se fit
frère mineur. Et il eut dans l’Ordre tant de sainteté et de grâce, qu’il
parlait avec Dieu comme le fait un ami avec son ami, ainsi que le constata
plusieurs fois saint François et qu’il sera expliqué plus loin.
De même, messire Bernard eut de Dieu tant de grâce, que
souventefois, il était ravi dans la contemplation de Dieu.
Et saint François disait de lui, qu’il était digne de tout respect et qu’il
avait fondé cet Ordre; car il était le premier qui avait abandonné le monde, ne
se réservant rien, mais en donnant tout aux pauvres du Christ, il avait
inauguré la pauvreté évangélique, s’offrant nu aux bras du Crucifié.
Lequel
soit béni de nous dans les siècles des siècles. Amen.
CHAPITRE 3
Comment saint François par humilité se fait poser un pied
sur la bouche et l’autre sur la gorge par frère Bernard, premier-né de son
Ordre
Le très dévot serviteur du Crucifié, messire saint François, par l’âpreté de la pénitence et les pleurs
continuels était devenu presque aveugle et voyait à peine la lumière. Une fois,
entre autres, il partit du couvent où il était et alla dans un autre couvent où
était frère Bernard pour parler avec lui de choses divines. Et arrivant en cet
endroit, il trouva en oraison dans la forêt, frère Bernard tout élevé vers Dieu
et uni à lui. Alors, saint François alla dans le bois et l’appela:« Viens,
dit-il, et parle à cet aveugle ».
Et frère Bernard ne répondit rien, parce que, étant homme
de grande contemplation, il avait l’esprit ravi et élevé vers Dieu. Et parce qu’il avait une grâce singulière à
parler de Dieu, comme l’avait plusieurs fois éprouvé saint François, il
désirait pourtant parler avec lui. Après quelque intervalle, il appela une
seconde et une troisième fois de la même manière; et aucune fois, frère Bernard
ne l’entendit; pour cela, il ne lui répondit pas et n’alla point vers lui. De
quoi, saint François s’en alla un peu désolé; et il s’étonnait et s’affligeait
en lui-même que frère Bernard, appelé trois fois, n’était pas allé à lui.
S’en allant avec cette pensée, saint François, quand il
fut un peu éloigné, dit à son compagnon: « Attends-moi ici ». Et il s’en alla près de là dans un lieu
solitaire et se jeta en oraison; il priait Dieu qu’il lui révélât pourquoi
frère Bernard ne lui avait pas répondu. Et
étant ainsi, une voix lui vint de Dieu qui lui dit: « O pauvre et chétif petit
homme, de quoi te troubles-tu? L’homme doit-il laisser Dieu pour la créature? Frère Bernard, quand tu l’appelais, était
uni à moi; pour cela, il ne pouvait ni venir à toi, ni te répondre. Donc, ne
t’étonne pas s’il n’a pas pu te parler, il était si hors de lui, qu’il
n’entendait rien de tes paroles ». Saint François, ayant reçu cette
réponse de Dieu, retourna aussitôt en grande hâte vers frère Bernard, pour
s’accuser humblement à lui de la pensée qu’il avait eue à son égard.
Le voyant venir vers lui, frère Bernard alla à sa
rencontre et se jeta à ses pieds. Alors saint François le fit se relever et lui
raconta avec grande humilité la pensée et le trouble qu’il avait eus envers lui
et comment, de cela, Dieu l’en avait repris. D’où il conclut ainsi: « Je
te commande par la sainte obéissance de faire ce que je t’ordonnerai ».
Frère Bernard, craignant que saint François ne lui commandât quelque chose
d’excessif comme il en avait l’habitude, voulut esquiver honnêtement cette
obéissance; d’où il lui répondit ainsi: « Je
suis prêt à vous obéir, si vous me promettez de faire ce que je vous
commanderai ». Saint
François le lui promettant, frère
Bernard lui dit: « Dites,
Père, ce que vous voulez que je fasse ».
Alors saint François dit: « Je te commande par la sainte
obéissance que, pour punir ma présomption et la hardiesse de mon coeur, dès que
je me jetterai à terre sur le dos, tu me poses un pied sur la gorge et l’autre
sur la bouche et qu’ainsi tu passes trois fois sur moi d’un côté à l’autre, me
faisant honte et me disant des injures. Dis-moi spécialement: Reste étendu,
rustre, fils de Pierre Bernardone; d’où te vient tant de superbe, à toi qui es
la plus vile des créatures? » Frère Bernard, entendant cela, bien que cela
lui fût très dur à faire, néanmoins, par la sainte obéissance, accomplit, le
plus courtoisement qu’il le put, ce que saint François lui avait commandé.
Cela fait, saint François lui dit: « Maintenant, commande-moi ce que tu
veux que je fasse: puisque je t’ai promis obéissance ». Frère Bernard lui
dit: « Je te commande par la sainte obéissance, que chaque fois que nous
sommes ensemble, tu me reprennes et me corriges durement de mes défauts ».
De quoi saint François s’étonna fort, parce que frère Bernard était d’une telle
sainteté, qu’il l’avait en grand respect et ne le croyait répréhensible en
rien. Aussi, depuis lors, saint François se gardait de rester longtemps avec
lui, suivant la dite obéissance, afin qu’il ne lui vienne aucune parole de
correction envers lui, qu’il connaissait d’une telle sainteté.
Mais quand
il avait le désir de le voir ou de l’entendre parler de Dieu, il se séparait de
lui le plus tôt qu’il pouvait et s’en allait. Et c’était un très grand sujet de
dévotion de voir avec quelle charité, respect et humilité, le saint père
François en usait et parlait avec frère Bernard son fils premier-né.
A la louange du Christ. Amen.
À SUIVRE..
Sursa
https://myriamiralasource.wordpress.com/2016/06/18/fioretti-de-saint-francois-dassise-3-premiers-chapitres-une-merveille/
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