ASIA
BIBI, Au Pakistan, les chrétiens à nouveau pris pour cibles, la-croix.com, 28
mars 2016
Marianne
Meunier, avec Claire Lesegretain, le 28/03/2016 à 17h06
Un
attentat-suicide dans un parc populaire de Lahore a fait au moins 72 morts
le dimanche de Pâques.
Les talibans ont déclaré avoir voulu cibler
les chrétiens, qui représentent 2 % de la population.
La cruauté a
pris une tournure presque indescriptible dimanche 27 mars, dans un parc
très fréquenté de Lahore, deuxième ville du Pakistan. Petits et grands profitaient d’un dimanche ensoleillé
entre les balançoires, les autos tamponneuses et les terrains de cricket dans
l’immense jardin Gulshan-e-Iqbal quand une explosion, sur un parking attenant,
a tué au moins 72 personnes, dont 29 enfants.
Les chrétiens, une
cible mais seulement une fraction des victimes
Un kamikaze « s’est fait exploser près de
l’aire de jeux pour enfants, où ils faisaient de la balançoire », a
indiqué Muhammad Usman, responsable administratif de la ville cité par l’Agence
France Presse. Les autorités ont décrété trois
jours de deuil dans la province du Penjab, dont Lahore est la capitale.
Une
faction des talibans pakistanais a revendiqué l’attentat-suicide lundi matin,
tout en précisant avoir voulu viser les chrétiens, qui célébraient Pâques ce
jour-là. « Nous avons perpétré l’attentat de Lahore car les chrétiens sont notre
cible », a indiqué un porte-parole du
groupe Jamaat-ul-Ahrar, émanation des talibans. D’après un porte-parole de la
ville, entre dix et quinze chrétiens ont été tués dans l’attaque, immédiatement
qualifiée d’« horrible massacre de dizaine d’innocents » par le
Vatican.
De nombreux attentats
contre les enfants et les chrétiens
Celle-ci a déclenché un double rappel au Pakistan. D’abord, celui d’un autre carnage visant des enfants, le
16 décembre 2014, quand un commando taliban a tué 154 personnes dont
132 élèves d’une école fréquentée par des enfants de militaires à
Peshawar, à la frontière avec l’Afghanistan. L’attentat, qui reste le plus
meurtrier dans les annales pakistanaises, avait suscité une émotion telle que
le premier ministre de l’Inde, voisin et éternel rival du Pakistan, avait
téléphoné à son homologue à Islamabad pour lui dire sa compassion.
L’autre évocation est celle
des nombreuses attaques qui visent les chrétiens au Pakistan . Le 15 mars 2015, un dimanche, le groupe Jamaat-ul-Ahrar
avait déjà revendiqué un attentat qui avait fait 17 morts près de deux églises de Lahore . En septembre 2013, c’est dans la cour d’une église de Peshawar que deux kamikazes se sont fait
exploser, un dimanche encore, tuant au moins 82 personnes.
Les chrétiens, une petite
minorité au Pakistan
Représentant 2 % de la population pakistanaise
(188 millions d’habitants), les chrétiens figurent parmi les minorités
religieuses les moins importantes du pays. Ils
y sont victimes de nombreuses discriminations, dont les attentats constituent
la forme la plus exacerbée.
D’après
Fides, agence d’information du Vatican ,
700 chrétiennes en moyenne sont chaque année enlevées, converties et
mariées de force à des musulmans. Quand elles s’en tiennent à la justice
lorsqu’il s’agit de musulmans, les représailles à l’encontre des chrétiens
accusés de blasphème peuvent aller jusqu’au meurtre.
Les chiites, autres victimes des attentats
Sur le
plan social, la communauté chrétienne est le plus souvent cantonnée au
nettoyage des rues et au ramassage des ordures. Des inégalités auxquelles n’a
pas remédié l’attribution de sièges aux minorités au sein du parlement national
et des assemblées provinciales.
Cibles
des attentats islamistes au Pakistan ,
les chrétiens voisinent avec une autre minorité sur cette funeste liste : les chiites, qui représentent
20 % de la population, majoritairement sunnite. À près d’un mois
d’intervalle, en 2013, ils ont été la cible de deux attaques à Quetta , dans la province
du Baloutchistan, frontalière de l’Afghanistan, qui ont fait plus de
170 morts.
Un appel du pape François
Le sort
réservé aux minorités religieuses a conduit le pape François à lancer, lundi
28 mars, « un appel aux autorités civiles et à toutes les composantes
sociales » du Pakistan « afin
qu’elles fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour redonner sécurité et
sérénité à la population, et en particulier aux minorités religieuses plus
vulnérables ».
L’attentat
du dimanche de Pâques met un point final à la période d’accalmie que le
Pakistan a connue en 2015, année la moins meurtrière depuis 2007 (date de
l’émergence du mouvement taliban), grâce un « Plan d’action
national » (PAN) contre les groupes violents.
Mais le
retour de la violence ne serait pas une fatalité, à en croire le premier
ministre Nawaz Sharif. « Notre résolution à combattre le terrorisme
devient plus forte à mesure que le lâche ennemi s’en prend à des cibles
vulnérables », a-t-il promis hier. Les Pakistanais ne demandent qu’à
pouvoir le croire.
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► Manifestation des militants anti-blasphème
Environ
3 000 personnes ont manifesté à Islamabad
lundi 28 mars et 25 000 à Rawalpindi ,
le dimanche de Pâques, en hommage à Mumtaz Qadri. Exécuté le 29 février
dernier, ce policier avait été condamné à mort pour le meurtre de Salman
Taseer, gouverneur
de la province du Pendjab et partisan
d’une révision de la loi sur le blasphème. De nombreuses factions islamistes en
avaient fait un héros. La manifestation s’est transformée, lundi,
en un face-à-face tendu entre les forces de l’ordre et les militants
islamistes, qui réclament
également la pendaison d’Asia
Bibi, chrétienne accusée
de blasphème.
Marianne Meunier, avec Claire Lesegretain »
ü
Sursa :
http://www.la-croix.com/Monde/Asie-Oceanie/Au-Pakistan-les-chretiens-a-nouveau-pris-pour-cibles-2016-03-28-1200749566?&PMID=4bede775d5652d1ad02c3439b8b3b995
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